Reprendre le contrôle de l’asthme
Une coopération en immunologie de précision a permis de saisir les parcours de santé réels de patients asthmatiques en combinant les données Internet des Objets, cliniques et génomiques afin de voir la maladie d’un nouvel œil.
L’asthme touche 300 millions de personnes à travers le monde et constitue la maladie infantile chronique la plus courante. Les crises d’asthme, bien que curables, peuvent être soudaines et graves, et même s’avérer mortelles si elles ne sont pas maîtrisées.
« Tout parent d’un enfant asthmatique redoute une crise nécessitant un transfert aux urgences ou même à l’unité de soins intensifs », explique Frank Nestle, responsable de la recherche et directeur scientifique de Sanofi. « Et si nous pouvions créer un monde sans asthme ? »
De nombreux patients souffrent d’un asthme provoqué par une inflammation de type 2, réponse immunitaire naturellement induite en cas d’infection parasitaire, mais qui peut être très virulente et déclencher des réactions allergiques. La recherche sur l’inflammation de type 2 est essentielle pour découvrir des solutions thérapeutiques contre l’asthme et d’autres affections allergiques. Mais celle-ci n’est pas le seul facteur contribuant à la maladie.
Les chercheurs de Sanofi adoptent une approche immunologique de précision pour comprendre l’asthme et projeter le diagnostic et le traitement de l’asthme dans une nouvelle dimension. À titre d’exemple, nous pouvons citer l’étude REGAIN : un projet mené en collaboration par Sanofi et la société de veille sanitaire Sema4, qui exploite les technologies de maîtrise de l’asthme élaborées par Cohero Health.
L’étude REGAIN porte sur les parcours de santé réels de centaines de patients asthmatiques, de tous horizons, pris en charge par l’hopital Mount Sinai de New York. En combinant les données de vie réelle avec des informations cliniques et moléculaires, cette étude vise à ouvrir la voie vers de nouveaux remèdes et à prévenir les crises d’asthme avant qu’elles ne se produisent.
Comprendre le parcours du patient
Sur les 1 200 personnes participant à l’étude REGAIN, environ 800 sont atteintes d’asthme et 400 sont des personnes en bonne santé qui servent de contrôle (voir encadré). Les patients utilisent des inhalateurs Bluetooth et des spiromètres de pointe connectés à une application mobile capables de mesurer et d’enregistrer à la fois la prise médicamenteuse et la fonction pulmonaire des patients dans leur vie quotidienne. Une application sécurisée sur le smartphone du patient, conçue par Cohero Health, collecte des informations sur son environnement, notamment la température, l’humidité, le taux de pollen et la pollution. Elle est également connectée au cabinet de leur médecin pour permettre un suivi en cas de besoin.
Les patients participants peuvent partager directement des informations précises et détaillées sur leur expérience de l’asthme, sans avoir à se souvenir de tous les détails par la suite.
« En tant que communauté, nous étudions cette maladie de manière beaucoup plus approfondie et plus dimensionnelle que jamais », explique Paul Bryce, directeur de recherche sur l’inflammation et la fibrose de type 2, qui dirige l’étude pour Sanofi. « Cette étude, qui englobe des données de vie réelle et un profil moléculaire, est d’une ampleur sans précédent. Les technologies mobiles et moléculaires nous aident à mieux comprendre l’asthme sous toutes ses formes, ce qui est essentiel pour identifier de nouvelles cibles pour les médicaments et constitue une grande partie de notre objectif. »
Données de vie réelle, cliniques et génomiques
Sur une période de 18 mois, les appareils de mesure à distance de l’étude REGAIN vont générer des données précieuses sur la manière dont les patients utilisent leurs médicaments contre l’asthme et dans quelles conditions. Outre les données cliniques et moléculaires, ils fourniront également des informations sur la manière dont le corps d’un patient réagit aux traitements. Les chercheurs combineront toutes les données de vie réelle, cliniques et moléculaires en utilisant la bioinformatique et l’apprentissage automatique pour découvrir des modèles significatifs.
Ces informations permettront d’élaborer une image détaillée et nuancée de l’évolution de l’asthme dans différents groupes de personnes afin d’aider les médecins à mieux adapter les traitements en fonction de chaque patient. Elles permettront également de mettre en évidence des cibles médicamenteuses prometteuses, première étape indispensable dans la mise au point de nouveaux traitements.
« L’asthme est un terme général qui désigne en réalité des troubles différents présentant les mêmes symptômes », explique Emanuele de Rinaldis, directeur et responsable de l’immunologie de précision chez Sanofi. « Actuellement, la recherche et les traitements se concentrent sur deux paramètres cliniques : la quantité d’air que les patients peuvent expulser de leurs poumons en une seconde, et le nombre de poussées d’asthme qu’ils connaissent en un an. L’étude REGAIN mesure bien plus d’aspects de la maladie, du séquençage de l’ADN et l’expression des gènes au ressenti des patients tout au long de la journée, afin d’identifier des facteurs communs à différents groupes de personnes. C’est ce qui nous permettra d’élaborer des traitements et des mesures de prévention ciblés. »
Rachel Sha, vice-présidente et responsable de la stratégie et de la gouvernance numériques, ajoute : « Nous souhaitons acquérir des connaissances plus approfondies sur l’asthme afin de concevoir des solutions et des thérapies plus performantes et ciblées à l’avenir. Pour ce faire, nous avons réuni des experts de renommée mondiale dans les domaines des maladies respiratoires, de la modélisation informatique des maladies, de la santé numérique et de la biologie. La collaboration avec Sema4, et le chercheur principal chez Mount Sinai, est essentielle à la réussite de ce projet. »
Anticiper les crises
Outre l’identification de nouvelles cibles médicamenteuses via l’étude REGAIN, les scientifiques de Sanofi et leurs collègues espèrent mettre en évidence les facteurs déclencheurs des crises d’asthme.
« Une partie de REGAIN consiste à identifier les facteurs communs les marqueurs biologiques qui peuvent nous aider à prédire une crise d’asthme plutôt que de minimiser son impact après coup », explique M. Nestle. « Nous voulons comprendre les parcours des patients asthmatiques dans le monde réel car c’est ainsi que nous pouvons véritablement changer le paradigme du traitement de cette maladie. »
Données REGAIN relatives au parcours patient
- Facteurs environnementaux (météo, densité pollinique)
- Marqueurs biologiques numériques (sommeil, activité)
- Horaires de prise des médicaments
- Réveils nocturnes
- Moment et gravité de la crise d’asthme
- Résultats, symptômes et éléments déclencheurs enregistrés par le patient*
Données moléculaires REGAIN
- Génotypage
- Séquençage du transcriptome entier (brosse nasale et sang entier)
Données cliniques REGAIN
- Dossiers de santé électroniques (mesures cohérentes)
Participants à l’étude REGAIN
- Les personnes atteintes d’asthme « de type 2 » sont bien prises en charge par les produits biologiques
- Les personnes souffrant d’asthme de type 2 sont bien prises en charge par d’autres traitements
- Les personnes atteintes d’asthme de type 2 ne sont pas bien prises en charge
- Personnes souffrant d’asthme « non-type 2 ».
- Personnes en bonne santé qui servent de contrôle
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Références
- Global, regional, and national incidence, prevalence, and years lived with disability for 328 diseases and injuries for 195 countries, 1990–2016: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2016. Lancet 2017; 390: 1211–59.
- Global Health Estimates 2016: Deaths by Cause, Age, Sex, by Country and by Region, 2000-2016. Geneva, World Health Organization; 2018.
- Global Health Estimates 2016: Disease burden by Cause, Age, Sex, by Country and by Region, 2000-2016. Geneva, World Health Organization; 2018.